Article paru le 02/10/2024 écrit par Emmanuelle Grill pour Journal du Québec
Saviez-vous que moins de la moitié des adultes québécois avaient préparé leur mandat de protection?
Sans ce document, on peut avoir de bien mauvaises surprises en cas d’inaptitude…
La plupart d’entre nous aimeraient qu’un proche prenne soin de nous en cas d’inaptitude. Bien souvent, nous avons même déjà en tête le nom de la personne à qui nous voudrions confier cette tâche. Or, les choses pourront se révéler bien plus compliquées que ce que l’on a anticipé si l’on n’a pas préparé de mandat de protection.
Imaginons un scénario dans lequel vos enfants issus d’une première union ne s’entendent pas avec votre nouveau partenaire de vie et qu’ils veulent prendre les décisions vous concernant si vous devenez inapte. Pourtant, vous auriez préféré que ce soit votre conjoint ou conjointe qui joue ce rôle. Un peu de prévention aurait pu éviter bien des tracas.
Pourquoi faire un mandat?
Vous pourriez être déclaré inapte par un tribunal si votre état de santé vous rendait incapable de prendre des décisions ou d’agir pour vous-même. Autrefois connu sous le nom de «mandat d’inaptitude» ou de «mandat en prévision de l’inaptitude», le mandat de protection est un document légal incontournable pour s’assurer de faire respecter vos volontés en cas d’inaptitude.
Nihal Selim, avocate et vulgarisatrice juridique chez Éducaloi, explique que le mandat de protection permet de choisir à l’avance qui prendra soin de vous et qui prendra les décisions pour vous. «L’un des gros avantages de préparer un mandat de protection est que nos proches n’auront pas à deviner ce que l’on aurait souhaité. On pourra par exemple y donner des indications sur le lieu de résidence, sur les soins qui nous seront prodigués, les consignes sur le plan financier, etc.», dit-elle. On peut aussi nommer deux personnes différentes, l’une pour les soins personnels et l’autre, pour ce qui touche le volet financier.
Les pouvoirs des mandataires
En plus de déterminer les responsabilités de la ou des personnes que vous avez désignées dans votre mandat, ce document sert aussi à préciser quels seront leurs pouvoirs et leurs limites dans la gestion de vos biens. Par exemple, seront-elles autorisées à vendre ou à hypothéquer une propriété, à investir votre argent, à contracter un prêt en votre nom, à utiliser vos actifs pour répondre aux besoins de votre famille, etc.? Si vous êtes propriétaire d’une entreprise, vous pourrez prendre des dispositions concernant la gestion de celle-ci.
À propos des soins, vous pouvez préciser le lieu où vous voulez être hébergé, prévoir des évaluations périodiques de votre santé, donner des directives sur les soins de fin de vie, etc. Il est également possible de nommer un tuteur pour vos enfants mineurs.
Bon à savoir: pour les mandats préparés et homologués depuis le 1er novembre 2022, les mandataires doivent tenir un inventaire des biens et des dettes au moment de leur entrée en fonction et rendre compte de leur administration à une ou des personnes de votre choix. Vous pouvez désigner le Curateur public si vous ne savez pas qui nommer pour cette tâche.
Qui peut préparer un mandat de protection?
Vous pouvez préparer votre mandat de protection vous-même. Le Curateur public du Québec a d’ailleurs publié un guide et un formulaire à ce sujet sur son site internet: Mon mandat de protection – Guide et formulaire.
Il est aussi possible de passer par un notaire. L’avantage du mandat notarié est qu’il est conservé en sécurité et qu’il est plus difficile à contester, car le notaire doit en assurer l’authenticité. Ce dernier vous fournira aussi des conseils judicieux et vous recommandera les clauses qui tiennent compte de votre situation personnelle, une union de fait, par exemple.
Homologation: une étape indispensable
Si vous devenez inapte, votre mandat devra obligatoirement être homologué par un tribunal pour pouvoir être utilisé.
«Le mandat ne s’applique pas automatiquement en cas d’inaptitude. C’est le tribunal qui, ultimement, décidera si la personne est effectivement inapte, et qui homologuera le mandat. Le cas échéant, il pourrait aussi décider de ne pas l’homologuer et plutôt choisir d’autres moyens afin de protéger la personne, comme une représentation temporaire», précise Nihal Selim.
Sachez que, même si le mandat est fait devant notaire, il devra malgré tout être homologué. Cependant, le processus sera moins long et moins complexe.