CELLIAP – Les pièges à éviter

Article paru dans la revue de la Chambre de la Sécurité Financière  (CSF) – ÉTÉ-AUTOMNE 2024

Fort populaire depuis le printemps 2023, le CELIAPP est un régime aussi généreux que complexe. Vous vous y intéressez ? Coup d’oeil sur les points à surveiller.

ÊTRE OU NON PROPRIÉTAIRE

Pour que le client puisse souscrire un CELIAPP, ce qu’il ne peut faire qu’une fois dans sa vie, il ne faut pas que lui ou son conjoint soit propriétaire du lieu principal de résidence où votre client habite. IL ne faut pas non plus que lui ou son conjoint l’ait été dans l’année d’ouverture du compte ainsi que durant les quatre années précédentes. Notons qu’ici, le terme conjoint désigne un époux, son épouse ou son conjoint de fait, soit la personne considérée comme telle d’un point de vue fiscal.

Selon Nathalie Hotte, cheffe de pratique, gestion des risques en savoirs et fiscalité (CQFF), il peut y avoir méprise avec ce critère, car le terme “lieu principal de résidence” utilisé dans le cadre du CELIAPP est souvent confondu avec le terme “résidence principale” employé pour l’exception de gain en capital. or, il s’agit de deux choses différentes.

Ainsi une personne qui serait locataire d’un appartement où elle habiterait à longueur d’année) et propriétaire d’un chalet (où elle se rendrait deux ou trois mois par année) pourrait ouvrir un CELIAPP. Celle qui vivrait toute l’année dans un chalet dont elle est propriétaire ne le pourrait pas.

 

COTISER AU BON MOMENT

Autre aspect susceptible de compliquer les choses : l’adhérent a 15 ans pour investir un maximum de 40 000 $, puis retirer les sommes accumulées pour l’achat d’une première habitation. Cela signifie que pour profiter du CELIAPP, votre client devra l’ouvrir suffisamment tôt pour avoir le temps d’y accumuler les 40 000$ qui lui serviront de mise de fonds et suffisamment tard pour être prêt à acheter une propriété dans les 15 années suivantes. Selon Mélanie Beauvais, actuaire et planificatrice financière chez Bachand Lafleur, Groupe Conseil, cela peut poser problème. “Une personne qui ouvrirait un CELIAPP à 18 ans ne sera pas nécessairement en mesure d’acheter sa première propriété à 33 ans”.

Vous craignez que le délai de 15 ans soit trop court pour votre client ? Mme Beauvais suggère de lui proposer de placer plutôt ses économies dans un CELI, ce qui lui permettra d’accumuler une certaine somme à l’abri de l’impôt et d’effectuer un transfert vers un CELIAPP au moment opportun. Cela dit, il est aussi important que votre client n’attende pas trop longtemps avant d’ouvrir son CELIAPP. Car dans l’intervalle, il pourrait trouver l’âme sœur. Or si cette dernière est propriétaire d’une résidence qu’elle habite et que les deux tourtereaux décident d’y faire leur nid, il arrivera un moment où votre client n’aura plus accès au CELIAPP.

IMPORTANT : TENIR LE COMPTE

Un maximum de 8 000 $ peut être déposé chaque année dans le CELIAPP. Les personnes qui ne disposent pas de cette somme pour alimenter le leur peuvent reporter leur cotisation non utilisée à l’année suivante. Cependant, la somme maximale pouvant être déposée dans un CELLIAPP au cours d’une même année est de 16 000 $ – ceux dont la contribution dépasserait cette somme devraient payer une pénalité de 1% par mois.

Cela fait craindre à certains qu’il puisse être difficile de suivre le fil des sommes investies. “Le problème pourrait survenir surtout si le client a des CELIAPP dans plus d’une institution financière”. dit Caroline Marion, gestionnaire fiduciaire chez Desjardins Gestion du patrimoine.

Le détenteur d’un CELIAPP a la possibilité de reporter la déduction fiscale que lui procurent ses dépôts, ce qui peut être avantageux sur le plan fiscal. Il peut aussi retirer les sommes de son CELIAPP sans avoir à payer d’impôt à condition de les utiliser pour acheter une habitation admissible ou de les transférer dans un REER. Mais s’il le fait pour effectuer un achat, il doit de nouveau se qualifier. L’exigence est alors partiellement la même qu’au moment de son adhésion: il ne doit pas être devenu propriétaire de son lieu principal de résidence, et ce, pour la même période que celle mentionnée précédemment. Par contre, si, encours de route, il s’est marié officiellement ou a décidé de faire vie commune avec un conjoint de fait propriétaire, cela ne sera plus un problème.

ATTENTION À L’INFORMATION DÉSUÈTE

Selon Nathalie Hotte, en 2023, de nombreux consommateurs ont ouvert des CELIAPP, alors qu’ils n’y étaient pas admissibles. Cela est évidemment dû à une erreur au moment de l’adhésion. Il est possible, par exemple, qu’un client ait oublié de mentionner que, trois ans auparavant, il était propriétaire de son lieu de résidence principal. Mais cela peut être aussi dû au fait que le conseiller en services financiers ou son client se sont fiés à l’information qui a été publiée dans des journaux ou des magazines entre le moment où le CELIAPP a été annoncé par le gouvernement fédéral et celui où il a commencé à être offert. or, durant cette période d’environ une année, les critères d’admissibilité ont souvent été modifiés, rendant l’information publiée vite désuète.

Dans un tel contexte, il est plus que jamais nécessaire de renseigner adéquatement son client. Pour ce faire, Nathalie Hotte suggère de lire avec lui l’information qui se trouve sur le site de l’Agence du revenu du Canada (ARC). “Ce site est particulièrement bien fait et l’information qui s’y trouve est à jour”, dit-elle. Agir ainsi est d’autant plus important que, ultimement, si le client fait une fausse déclaration, c’est lui qui en sera responsable face à l’ ARC.

 

…ET PARFAIRE SES CONNAISSANCES

Mme Hotte invite aussi les conseillers à consulter le Centre d’Information du Centre québécois de formation en fiscalité, qui contient une panoplie d’informations relatives notamment à la fiscalité. le CQFF offre plusieurs formations en lien avec le CELIAPP, dont une d’une durée de quatre heures intitulée “Accession à la propriété : RAP, CELIAPP et autres mesures fiscales”. De plus, le cours annuel “Mise à jour en fiscalité”, offert en deux formats, donne un accès exclusif à plusieurs documents de référence, dont certains en lien avec le CELIAPP.

 

source : CSF ÉTÉ-AUTOMNE 2024